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À présent, hormis l’argument douteux de l’introduction furtive et forcée du concept autant hypnotisant qu’envahissant de “mobilité douce” (!), quelles raisons sérieuses apporteraient au contribuable les édiles qui en quelques années seulement ont fait disparaître en ville 2500 places de stationnement pour ne proposer en échange aucun parking souterrain, cela après avoir d’abord éliminé les places blanches gratuites (à durée illimitée), ensuite les places rouges (durée 15 heures) et enfin les places bleues (durée 90 minutes), pour conserver uniquement les places payantes?
Heureusement, ces mêmes édiles ont pourvu aux besoins des contribuables en remplaçant toutes ces places disparues pour le stationnement des voitures tout d’abord par encore plus de supports en acier où les cyclistes peuvent cadenasser en toute sécurité leurs propres moyens de transport après avoir parcouru les boulevards qui leur ont été créés dans une petite ville qui compte plus de 300 m de dénivelé, ensuite par encore plus de places de stationnement pour personnes handicapées (qui, il faut le dire, restent souvent inoccupées tant leur nombre dépasse celui des véhicules autorisés), et enfin par des places à usage commercial.
Au moins toutes ces mesures ont un avantage notoire, s’il l’on se rappelle une soirée restée fameuse il y a plusieurs années en arrière lorsqu’une représentation majeure de ballet a rempli la grande salle du Comptoir Suisse. Malheur fut à tous les spectateurs qui n’avaient pu trouver place pour parquer leurs voitures aux alentours: à la sortie: strictement toutes ces voitures posées à qui mieux mieux la chance (des centaines probablement) portaient sous leurs balais d’essuie-glaces de fières amendes pour mauvais stationnement, que leurs propriétaires-spectateurs ont dû ajouter au prix du billet d’entrée dont l’impôt sur le divertissement était déjà inclus. Eh bien, à l’avenir plus de telle fâcheuse surprise pour les cyclistes-spectateurs qui disposeront de barres d’acier à profusion pour cadenasser leurs moyens de transport.
Heureusement aussi qu’à Lausanne la règle de la limite à 30 km/h n’a pas – encore – gagné jour et nuit l’entier territoire de la ville comme c’est déjà le cas à Fribourg, mais nul doute qu’au vu de la tendance actuelle de proscrire l’usage de la voiture au bénéfice de la mobilité douce, des vélos, trottinettes électriques ou non et autres skateboards et rollers électriques ou non, il ne s’agit là que d’une simple question de temps. Heureusement encore que ce petit pays ne fabrique pas des automobiles, autrement je peux facilement imaginer le combat de titans que ces édiles auraient à mener avec les syndicats correspondants. Mais il est aussi vrai qu’il ne fabrique non plus des trottinettes, des skateboards et des rollers… Étrange donc. Le fait est que sur ces zones de plus en plus nombreuses les édiles ont fait d’une pierre deux coups: non seulement sont-elles limitées à 30 km/h, mais les chauffeurs ont chopé une telle peur qu’ils roulent souvent à 20, 15 voire 12 km/h.
À ce titre, il serait peut-être intéressant de s’interroger sur le profil de ces édiles et fonctionnaires qui se succèdent ces derniers temps et se ressemblent tant, joliment payés par les impôts du même contribuable qu’ils soignent. Seraient-ils tous piétons, cyclistes ou skateboarders? Les descriptifs des postes qu’ils pourvoient seraient-ils conçus de telle façon afin d’attirer, filtrer et recruter des personnes taillées sur mesure précisément pour produire de tels résultats? N’y aurait-il aucune levée de bon sens dans l’administration, ou bien est-ce que tout ce pétchi est rendu possible rien qu’au nom du sacro-saint consensus suisse? Et la police dans tout cela, qui nous assure être toujours prête pour servir et protéger mais qui passe sereinement et systématiquement par devant l’armada de clochards professionnels et de vendeurs de drogue qui sont désormais placés pratiquement à chaque coin de rue, alors que les lois interdisant la mendicité et le traffic se suivent, se ressemblent et restent finalement vaines?
Le fait est que depuis maintenant plusieurs années et portés par la mobilité douce, nous vivons sous le règne des vélos [Note]Voir “L’âge des monarques”[/Note] qui ne connaissent qu’exceptionnellement les feux rouges, les passages pour piétons, les trottoirs, souvent roulent à la vitesse des voitures et parfois même plus vite encore. Par conséquence, pour être renversé et projeté à terre il n’est même pas besoin d’être une babushka clopinant entre ses béquilles: il suffit d’être au mauvais moment sur le trajet d’un vélo, car même un jeune sumo n’y fait pas le poids, si j’ose. En corollaire, sur des routes souvent rendues étroites pour causes diverses. où parfois la deuxième voie a disparu au profit d’un boulevard pour vélos, gare si par malheur la distance entre ta voiture et le vélo que tu dépasses à basse vitesse est de mois de 30 cm: derrière tu te payeras un hurlement ponctué par les plus innovantes insultes. Précisons tout de même que souvent ces cohortes d’usagers de la route circulent sur leurs deux roues aux heures de travail en tenue légère adéquate – combinaison moulante, capuche, masque, casque, chaussures à crampons, ce qui soulève la question s’ils ont bien un tel travail, ou alors s’ils ne seraient des rentiers, ou alors en vacance, en congé, ou à l’entraînement en tant que membres d’un club professionnel lambda.
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Tout ceci n’est qu’un bref extrait du monde meilleur installé ces derniers temps. Et je précise: rien (ou presque) n’est exagéré.
[20 février 2024]