«Il est dangereux d’avoir raison
sur des sujets où l’autorité officielle a tort».
(Voltaire)
« …Victimes de la vérité derrière les messages
des stoïques Saints du profit qui
qui sourient lorsque les merveilles
de toutes sortes déboulent dans leurs poches… »
(Deep Forest, ‘Endangered Species’,
de l’album ‘Music Detected’)
[…] Surtout après leur déroulement. Mais aussi pendant. Il suffit de se rappeler les différentes fausses alertes visant d’autres bâtiments de prestige; les dispositions prises pour mettre à l’abri divers dignitaires; le branle-bas autour de la question des effets boule-de-neige sur la ville de New York, sur l’Amérique entière et sur le monde en général; le jeu des situations d’urgence stratégique (les fameux niveaux de DEFCON)151; le ballet des commentateurs et la valse des spécialistes ès affaires stratégiques, ès questions islamiques, ès sociologie, ès psychologie, ès terrorisme, chacun livrant son lot d’expertise en la matière.
L’après 11 septembre fut pourtant beaucoup plus riche à ce titre, peut-être par souci de ne pas gaspiller – voire: de renforcer – ce qui avait été acquis entre-temps. Il y eut les multiples alertes aux gaz anthrax; celle causée par la défaillance d’un réacteur qui fit tomber un Airbus A300 d’American Airlines sur le quartier de Queens à New York (c’était le 12 novembre 2001 et il y eut 255 victimes); l’attentat du 28 novembre 2002, perpétré contre un hôtel de Mombassa (Kenya), qui fit 13 morts; ce même jour, la tentative avortée de détruire en vol un Boeing B757 affrété par le plus gros tour opérateur israélien Arkia et qui effectuait la liaison Mombassa – Tel Aviv; la tentative également échouée du passager néo-zélandais Richard Bruce Reid de faire exploser ses chaussures le 22 décembre 2002 dans l’appareil qui reliait Miami à Paris; l’interdiction absolue d’embarquer à bord d’un avion avec la moindre lime à ongle, la moindre pince à sourcils, le moindre cure-dents.152
L’orchestration des retombées stratégiques internationales
Le coup du 11 septembre 2001 a permis aux États-Unis d’Amérique d’occuper impunément l’Afghanistan et l’Irak; de mettre sur la sellette des pays-charnière, comme l’Iran, l’Arabie Saoudite et la Syrie; de fraterniser, au nez et à la barbe de Moscou, et à coup de dollars, avec d’anciens États de l’ex-Union Soviétique, majoritairement musulmans, comme le Kirghizistan, le Tadjikistan, le Turkménistan et l’Ouzbékistan; enfin, d’asseoir officiellement un leadership décisionnel absolu qui jusque-là ne s’était manifesté qu’officieusement.
L’orchestration des médias du pays dit plus libéral en la matière
En tant que miroir à la fois d’une nation et des faits, les médias ont acquis un rôle sans précédent sur le plan de la création des opinions. À plus forte raison aux États-Unis, où leur impact en la matière est absolu. Aussi, leur importance dans la gestion des faits était, évidemment, primordiale. À la mesure de leur légendaire liberté, affichée avec arrogance. Comment dès lors ne pas rester sans voix devant l’accablante uniformité et platitude, si ce n’est l’affligeant conformisme et servilisme, dont les médias ont fait preuve en couvrant153ces moments? Bien sûr, je ne parle pas de la couverture en images, ou de la façon dont furent restituées les nouvelles. Je parle de leur ton, de leur attitude, de la façon dont fut traitée leur mission de base – l’information, qui se doit de se tenir autant que possible dans la neutralité et la verticalité. Mais dans le cas présent, il faut vraiment une volonté d’acier pour tenter de retrouver, par ci par là, des commentaires opposés à ceux ouvertement et violemment alignés, qui constituent, on l’a compris, l’écrasante majorité.
Le détournement des consciences
Traumatisme des faits, médias et voix officielles aidant, il ne s’en est pas failli de beaucoup pour créer outre-Atlantique un état général d’hystérie propre aux masses, qui fit vite des ravages. Fin 1941, il ne faisait pas bon pour les citoyens américains d’origine japonaise de trop se montrer154.Dix ans plus tard, l’heure des comptes sonna pour ceux qui furent soupçonnés de sympathies communistes155. Cinquante ans après, vînt le tour des arabes et, de façon plus générale, de n’importe quel bronzé porteur de keffieh, turban, fez et autres couvre-chefs ‘pas comme chez nous’. Si, jusqu’alors, afficher en Amérique sa différence, éventuellement sa fronde, par rapport à tout et – souvent – à n’importe quoi, était presque devenu une spécificité du pays, dès le lendemain de la tragédie, bien que cette tradition ne disparut pas, elle enregistra une exception nette, et une seule: la référence au ‘nine eleven’, au 11 septembre. Qu’elle soit affichée sur des t-shirts ou sur les murs des maisons, ou encore – et surtout – qu’elle soit exprimée de vive voix, elle se devait d’être alignée à la version officielle, sous peine de violentes réactions de l’entourage. Qui parlait d’un communisme à l’américaine?…
L’esquive des évidences
Patiemment, il est possible de trouver, comme je viens de l’affirmer, des ‘poches’ où la conscience vit encore. Tel ce site Internet156qui démontre, calculs et formules à l’appui, qu’anéantir une tour du World Trade Center suite au seul choc produit par un avion, auquel s’ajouterait la ruine des matériaux de résistance de l’immeuble par l’effet de la chaleur dégagée lors de la combustion du kérosène, c’est pratiquement impossible, car insuffisant. C’est assez troublant, car un ingénieur civil de mon entourage, que j’avais questionné sur la chose ce matin-là même, m’avait proposé la même conclusion sous une forme succincte et autrement formulée.
Mon but n’est pas de faire ici l’inventaire de ces preuves, ni de me livrer à une investigation personnelle que je ne saurais conduire par manque de moyens, de compétences et d’intérêt. Je compte souligner en revanche l’existence manifeste d’une volonté destinée à éviter l’examen officiel, impartial, professionnel, approfondi et complet des causes et autres épiphénomènes de cette tragédie. Si, en son temps, le rapport de la commission Warren sur les circonstances de l’assassinat de l’ancien président John F. Kennedy fut maintes fois critiqué pour son caractère amateur, subjectif et lacunaire (eu égard l’importance du sujet), force est aujourd’hui de lui reconnaître, par rapport aux ‘événements du 11 septembre’, au moins le mérite d’avoir existé. Comment se fait-il que cette Amérique si volontaire tolère l’absence d’un maillon tellement crucial sur la voie de la recherche de la vérité, c’est déjà une autre question.
Le musellement des opinions
Dans le prolongement du détournement des consciences, qui fait encore partie de l’arsenal de la propagande, nous avons aussi constaté l’apparition de cet instrument de censure qui appartient, lui, au domaine de la répression. D’une part, le processus d’endoctrinement dépassa rapidement le cadre relativement restreint des arabo-américains anonymes, pour s’en prendre à tout contestataire de la version officielle, fut-il blanc, chrétien et célèbre157. D’autre part, via les courants d’idées, les canaux des médias, mais aussi ceux des affaires, furent jetées en un temps record les bases nécessaires à l’instrumentation légale et juridique de ce volet important de l’opération. C’est de cette façon qu’a été réussie…
La soumission des acteurs politiques
Au tout début, cette subordination apparut comme une autre forme légitime de la cohésion nationale sans faille au-devant d’une adversité extrême. Comme lorsqu’un cataclysme naturel frappe la vie de la communauté. Visages graves, députés, sénateurs et autres gouverneurs démocrates ou républicains exprimaient à l’unisson les mêmes préoccupations. C’était mal saisir le problème, car bientôt vint le tour les demandes d’octroi de budgets incommensurables, qui étaient censés financer rien que la lutte contre le terrorisme. Le Congrès vota et, en deux ans, 167 milliards de dollars du contribuable partirent ainsi dans cette direction. Suivit ensuite le fameux ‘Patriot Act I’, adopté par le Sénat à peine six semaines après les frappes. Quantité de libertés civiques – fierté et pierre angulaire de la démocratie américaine – étaient ainsi limitées ou suspendues. Continuons avec la création sans obstacles d’un super-fauteuil de ministre de la sécurité intérieure. Enfin, surprise!, même si les conditions et l’esprit n’étaient plus les mêmes, vint le tour du ‘Patriot Act II’, extension du premier, qui est actuellement débattu au Congrès.
L’exaltation des éléments – justement – patriotiques
C’est connu: un choc matériel et moral d’une telle ampleur et violence ne saurait laisser pour compte le patriotisme d’un peuple. Surtout en Amérique – l’histoire récente l’a prouvé 158. Et c’est exactement ce qui s’est passé. L’élan yankee prit un envol spectaculaire, et la côte du président en exercice grimpa au zénith, malgré une conduite initiale très discutable. Certes, toute nation qui se respecte se doit de posséder dans son inventaire le patriotisme. Elle se doit aussi de le cultiver. Il n’empêche que dans ses manifestations, et particulièrement dans ses dérapages, ce sentiment frôle assez souvent le grotesque. Tant que ces formes caricaturales d’exagération servent les intérêts d’un pays qui se trouve – par exemple – en état de guerre, on serait tentés de lui accorder un certain rôle thérapeutique, donc bénéfique. Eh bien, nombreuses sont aujourd’hui les formes caricaturales revêtues par le patriotisme américain, notamment par rapport à la problématique arabe. Cependant, n’en déplaise à ce président, le pays n’est pas en état de guerre avec le monde arabe.
L’application des mesures coercitives
Ce ‘détail’ n’est qu’un effet de l’ensemble des aspects traités ci-dessus. Une fois l’arsenal mis en place, les arrestations arbitraires, les longues détentions injustifiées, les procès orchestrés, les pressions et les intimidations complètent un tableau qui prend forme petit à petit
Pour conclure, je me demande: si tout ceci n’est pas un vrai chef-d’œuvre dans son genre, alors de quoi devrait avoir l’air un tel vrai chef-d’œuvre?!
Addenda: ubi, quando, quid, quis, quibus auxiliis, cur, quomodo.
Vingt siècles en arrière, Quintilien relevait de manière on ne peut plus synthétique ces catégories, indispensables pour analyser et considérer les circonstances de tout acte (en l’espèce criminel), avec la particularité que, forcément, la vérité ne saurait surgir qu’une fois connues les réponses à toutes ces questions. Alors:
Ubi: où a eu lieu l’acte? où se trouvait son objet? Ça, au moins, c’est connu, mais c’est encore loin d’être suffisant.
Quando: quand? Ça, en tout cas, c’est aussi connu: le 11 septembre 2001, n’est pas?
Quid: quel est l’acte? mais aussi quel est l’objet de l’acte? Ça, c’est connu également: la destruction d’objets et de vies humaines. Les objets sont restés gravés sur toutes les rétines.
Quis: qui est l’auteur? L’on ne sait pas. J’entends par là que surtout devant d’une telle monstruosité, des preuves abondantes et parfaitement irréfutables sur l’identité des suspects auraient dû être considérées absolument obligatoires avant de désigner ces suspects comme auteurs – commanditaires ou exécutants. Mais ces preuves sont absentes. Elles l’étaient au lendemain des attentats et on les attend encore aujourd’hui. Ou alors elles existent, et elles ont toujours existé, mais n’ont pas été révélées. Tout ce que l’on ‘sait’, repose sur les déclarations d’une poignée de hauts dirigeants politiques, selon lesquels ces preuves existent. Punkt Schluss.
Quibus auxiliis: à l’aide de qui/quoi? avec quelles aides? On ne sait pas non plus. Comment le savoir ? Cela supposerait que les auteurs aient déjà été nettement identifiés. Retour à quis. Ce qui est connu repose sur l’intuition que tout barbu basané porteur de keffieh est un complice (potentiel) qui n’a qu’a bien se tenir et qui a surtout intérêt à prouver son innocence.
Quomodo: comment? Là aussi il y a un problème. Les kamikazes dont nous avons tous vu les portraits à la télévision sont morts jusqu’au dernier. Donc on ne peut guère les interroger sur ce point. Ou bien ils n’ont jamais existé, ou alors ils sont disparus – allez savoir!, car les passagers qui auraient pu être interrogés là-dessus sont aussi tous morts. Ou n’ont jamais existé. Ou ils sont disparus. Par ailleurs, les fameux enregistrements audio et vidéo de leur ‘commandant suprême’ non seulement n’ont jamais été identifiés sérieusement, mais ils n’ont pas été expressément revendiqués. Comme les attentats d’ailleurs. Et un attentat non revendiqué reste, au-delà de tout ce qu’il est possible d’échafauder sur le compte de ses auteurs présumés, quelque chose de particulièrement étrange.159 Ainsi, sur la question de l’instrument humain, force nous est-il de constater que nous restons un peu bredouille. La question de l’instrument non-humain est aussi délicate. Laissant de côté le cas du Pentagone, nous avons tous bien vu deux avions percuter les deux immeubles du World Trade Center. Mais comment exactement? Comment cela est-il concrètement possible? Je veux dire : comment ferait un aviateur de petits zincs de dimanche pour piloter une usine tel un Boeing 767; pour viser une cible de 50m, en vol à petite vitesse et à environ 200 m de hauteur, dans un centre-ville bourré de gratte-ciel, de câbles, d’hélicoptères, de cheminées, d’antennes, avec une ‘cargaison’ hostile (un équipage et des passagers qui savent qu’ils mourront en peu de temps et qui, de ce fait, n’ont plus rien à perdre); et enfin, dans ces conditions, pour diriger le projectile pile au milieu de la cible? À cette vitesse-là, 0.1 secondes d’inadvertance, d’inattention, d’imprévu, d’hésitation, un atchoum, un hoquet, suffisent pour rater l’objectif. Mais il n’y a pas eu de ratés. Pour des amateurs entraînés pendant quelques semaines sur des simulateurs de vol et sur des biplaces de plaisance, cette performance est beaucoup plus qu’un exploit.
Cur: pourquoi?
Honnêtement, c’est la grande question. Quel aurait pu être le résultat escompté par ce réseau terroriste-là (en supposant que ses membres furent les instigateurs et les auteurs des attentats) à la suite d’un tel acte innommable? À première vue, la plus simple réponse serait: rien. En principe, un acte terroriste peut être – apparemment – gratuit. Il peut très bien frapper par ricochet, aux 2ème ou 3ème degrés. Oui, peut-être, mais pas un acte tel que celui-là. Comme pour toute chose dans ce monde, il existe un sens et une discipline aussi dans le secteur du cauchemar. Un exemple: admettons le cas inverse d’un mouvement férocement anti-islamique qui, un jour de dhu’l’hijja, qui est le mois du pèlerinage, lancerait simultanément de gros projectiles incendiaires sur la Kaaba de la Grande Mosquée de La Méque, sur le Dôme du Rocher à Jérusalem et sur la Mosquée du Prophète à Médine. Qu’obtiendrait-il autre qu’un blâme planétaire? En d’autres termes, je suis persuadé qu’il existe des gestes qui par leur force symbolique, dépassent de loin le terrorisme – en tout cas tel que nous l’avons vécu avant le 1191. Cela dit, et par réduction à l’absurde, on pourrait paradoxalement déduire qu’un tel acte ne saurait être le produit d’une volonté antagoniste, pour autant que cet ennemi ne fonctionne selon des schémas mentaux, stratégiques et – cas échéant – doctrinaires absolument autres que ceux qui ont cours dans le monde connu. Or justement, que je sache, ces formations anti-américaines ne sont pas composées de martiens, et leurs méthodes sont listées depuis belle lurette. Et puis, si j’avais été le chef barbare de ce réseau, cheville ouvrière de ces attentats à New York et Washington, enragé de punir le grand méchant anglo-américain; en admettant que, depuis ma grotte de l’Hindu-Kush, j’aurais tout de même eu les moyens de l’inimaginable logistique exigée pour réussir mes forfaits; – eh bien, ne les aurais-je pas répété? Au moins une fois, pardi! Et vlan, le jour de Noël, ci un avion sur la Bourse de New York, là un autre sur l’aéroport O’Hare de Chicago, un autre sur le Westminster de Londres et un dernier sur le Golden Gate Bridge de San Francisco. Cependant, depuis ce jour-là, plus d’attentats.
Mais alors: qui, avec quels appuis, comment et pourquoi ?
[6 octobre 2002 – 12 octobre 2003,
revu superficiellement le 13 septembre 2023]
PS. À l’exception de changements mineurs et sans impact aucun sur la substance du texte, c’est expressément que je n’y suis pas intervenu pour le mettre à jour. Beaucoup de choses se sont passées depuis sa création il y a vingt ans, mais il est suprenant de voir qu’aucune ne le contredit ou le rend désuet. Au contraire.
[13 septembre 2023]