Moult est dulse et frumœuse la limbe que nous vorbons !

Catégorie: Humour

Lim­ba Românească

« Mult e dulce și fru­moasă / Lim­ba ce-o vor­bim, / Altă limbă armo­nioasă / Ca ea nu găsim. / Saltă inima-n plă­cere / Cînd o ascultăm / Și pe buze aduce miere / Cînd o cuvîntăm.

1857 – Ori­gi­nal de George Sion (1822-1892)

La limbe romanes

« Moult est dulse et fru­mœuse / La limbe que nous vor­bons / Une autre langue armo­nieuse / Comme elle nous ne trou­vons. / Saute le cœur en plai­sir / Quand nous l’ascultons / Et sur les lèvres apporte du miel / Quand nous la parlassions. »

2014 – Tra­duc­tion de Mouhammem

(Je sais bien que ce n’est pas bien de tendre l’oreille aux dis­cus­sions des autres. Voi­ci pour­tant ce que j’ai pu entendre l’autre jour par hasard, quelque part du côté de Jiour­jiou, en Roumanie.)

Aaaa… salut !

Cum ești ? Ça va ?

Bien. Et toi ?

Bien-bien, les târ­guelles, quoi !

Aa…

À pro­pos, main­te­nant Car­re­four s’enquide à cinq heures et demi ?

Quoi ?!  Noon, tou­jours à cinq heures. Tu dois te grăber.

Alors ça joue… Y’a aucune grabe. J’ai le temps.

Tu viens alors boire un suque ?

Ok. Tu connais un caféné ?

Oui, un peu plus bas, à côté de cette pra­va­li… com­ment elle s’appelle ?… ahh…

Ah, oui… aa… attends… Licu­ri­ci. Lee Cou­ritch ! Ha-ha-ha.

Cor­recte ! Allons.

Fais gaffe de ne pas alu­ne­quer sur ces frunzes mortes-là.

Zut ! Merci.

(Un peu plus tard)

Ben voi­là, ils nous ont adou­né tous, genre pour nous linich­ter qu’il n’y a pas de don­nées dehors, mais tu crois quoi ? Quelqu’un est proste ?

Bon, mais je ne pri­cèpe pas, sim­ple­ment comme ça ? déodate ?

Oaré­coume. Un cer­tain temps ils se sont ender­gé à nous per­sua­der que ça va se lïm­pé­sire, mais c’était clair que ça miros­sait déjà le putré­goi. En fait ils avaient gré­shi la tzinte dès le départ.

C’est-à-dire ? Com­ment, ils se sont enshélé?

De sart­chine. Mais oui. C’était clair que la sart­chine nous dépăchait.

Mais quoi, vous étiez une gachque de haïmanalles ?

Allez ! C’est pas ça. Mais cha­cun avec sa munque, cha­cun endé­pline sa tréabe à son loque, et tu peux pas venir comme ça, răs­tour­ner une situa­tion de azi pe mâine.

Hm…

Ren­de­ment, disent-ils !

[Cine a coman­dat cafeaua ?…]

Eu, mer­ci.

[Pof­tiți.]

Mer­ci.

Tu veux du lait ?

Oui, un peu. Merci.

Tu prends un corne ?

Non, tu peux te servir.

Laisse ça. Ben, et qu’est-ce qui va urmer à présent?

Tiens, ceux-là ils ont aus­si des çuperques avec de la mama­ligue, et aus­si des petits !

Allez… j’vais quand même pas m’otrăvir. On n’est pas venus pour halire. Dis, qu’est-ce qui va urmer ?

Qu’est-ce que tu veux que ça urme ? Rien. Main­te­nant le direc­teur băs­me­shte qu’il va nous sou­poun­ner le plan de restruc­tu­ra­tion. On ver­ra ce que ça va encore don­ner, cette his­toire. Pour l’instant ils nous tiennent sur petit feu. Jusqu’au jour où quelqu’un va explo­der et va scap­per une nashpe.

Țțț…

Quelqu’un l’a déjà sphi­dé, il l’a presqu’aménïntzé. C’était haïosse.

Ha !

Encore un oum­phlé ! Si tu savais com­bien de fois il ne l’a pas ples­ni avec ses pré­vi­sions !… Et je te dis pas com­ment il se donne avec les poumnes dans le piepte, comme quoi il s’est jert­phi ! Laisse moi rire, sa jertphe a lui…

Et j’parie qu’il va gar­der sa place. (Driiin, driiin, le télé­phone sonne.) “Aloo, aloo, oui, da… Oui… Aaa, oui, salut, com­ment tu vas ?… Oui… Eh… Voi­là, da măi, je sais, il a négo­cié ce qu’il a pu, quoi ! Qu’es tu peux faire, ha ? Ouuui, oui… Clar… Puis quoi, on s’étonne encore ? Ce pur­cen­taj a avut à la fin ? Șaize… Ahaa… Ouuii, je sais… Ecoute… Hai că… Da. Ecoute, je peux t’appeler un peu plus tard ?… oui, c’est moi qui t-appelle, ok ? Oui, comme ça, tchô, tchô, pa.” Voi­là, excuse-moi, c’était…

Y a pas de sou­ci chéri.

Qu’est ce que je disais ? Toi, tu disais quoi ?

Ziceai d’un col­lègue qu’il s’est jertphi.

Ah, oui, c’est ça.

Ben alors. Laisse tom­ber… Un type… Il s’embouibe toute la jour­née avec des flo­ri­celles. Tu t’effrayes… Là il a une jambe en gypse, il dit que ça vient du ski. Enfin.

Quelqu’un devrait battre du poumne sur la masse !

Oui, je sais, mais…

Mais vous ne vous étiez pas engri­jo­rés pour cette situa­tion ? Vous n’avez rien sous­pec­té quand le gyro­phare a com­men­cé à clip­per, ou alors quand les stops se sont faits rouges ?

Mais oui, mais oui, eeh… com­ment donc ? Mais qui s’est endoyé qu’on en arri­ve­ra là ?!

Țțț…

… une nashpe ! Des sartchinnes !

C’est-à-dire ?!

Eeh… ses tam­pennes à lui… Et quand les dobandes ont sco­bor­ré, est-ce que quelqu’un c’est engrijoré ?

Jus­te­ment !

Ben jus­te­ment, ciu­ciu s’est engri­jo­ré. Et je te dis pas com­bien ça nous a coû­té en kel­tuels d’expertise et ain­si de suite. Pour moi il est clair que per­sonne ne stă­pîne plus rien, mais plus rien.

Incroyable.

En fait, tu sais ce qui me révolte ?  Allez, tu perds ta slou­jbe, passe. Mais alors, qu’il se batte joque de toutes ses opi­nions ?! Je ne sais pas moi, un peu d’entzélédgère, je ne demande pas qu’il s’endouiosh de ma soarte, mais au moins un peu de considération…

Et les autres ?

Qui ?

Les col­lègues.

Eh… Des Romans comme tous les Romans, cha­cun regarde son bour­rique, cha­cun cherche à se des­cur­quer comme il peut, cha­cun avec ses chmékéries.

Et toi ?

Mais j’ai quelle alléd­gère, moi ? Quelle allèd­gère j’ai ? Dis-moi.

Hum, j’sais pas… Mouais… Tu pour­rais te tocmer ?

Non. Puisque je te dis : je n’ai pas d’allédgère.

C’est-à-dire j’ai, puisque je vais cher­cher une slu­jbe de secré­taire, mais penses un peu à la léaffe !…

Oui.

Et je me demande, à mon âge… C’est vrai aus­si que ça avait com­men­cé à me plaire ! En plus, ceux-là ils ames­tèquent tout, ils te prennent avec le calculateur…

Oui, et puis ?

Mais moi je ne sais même pas appuyer sur une clape !

Allez, ça s’apprend.

Je sais, mais quand même.

Moi, c’est autre chose que je trouve con : la marge e tare petite.

Ouaais… Je sais.

Mais au moins t’as une pile ?

Quelle pile ?

Je ne sais pas, t’as quelqu’un pour te sprijinir ?

Non, je n’en ai point.

Țț… Je connais un procureur.

Eeh… Ils se mêlent pas !

Je ne sais pas, moi.

Ils se mêlent pas.

Ma foi, lui c’est un kaphtangiou.

M’en fous, ils se mêlent pas. Ils ascultent, tous. Ils se sou­pounnent. C’est ça la Romanì, ma chère !

Ils ascultent de qui ?! À qui ?!

Mais qu’est-ce que j’en sais !

Ok, mais par­mi tes vécins t’a vrai­ment per­sonne ? Là où vous étes…

Non, je n’en ai pas. Quoi là ?!… J’ai un vécin zidarre, un autre il est tini­ki­gieux et il fait aus­si des oblons et des sis­tèmes d’enquiderre, y’a un qui a une fabrique de spoume, et c’est un peu tout. Ah oui, et il y a encore un qui importe des grindes métal­liques pré­fa­bri­quées. Il s’en est rem­pli les bou­sou­nars. Tous oum­phlé de paralles. Mer­ci. Tous pro­fes­sion­nistes du bâti­ment. Il y a un seul qui tra­vaille aux auto­strades, mais je te dis qu’il se mêle pas.

Hum…

Aucun ne s’arrunque dans des trucs pareils, c’est moi qui te le dis.

Tu devrais lucrer ton anglais.

Oui, je sais, je ver­rai. Ma foi, pas­sons… T’as quoi dans ta plasse ?

Ah, non, ici il y a un maga­sin et ici ce sont tous les cahiers de ma fille. On est res­tées les embra­quer ensemble et main­te­nant je les lui apporte à la maison.

Ah… Le maté­riel est joli.

Mais oui, et rabat­té en plus.

Ah… Bra­vo. Chouette.

On y va ?

Allez. Mer­ci pour le café.

(Un peu plus tard)

Regarde, ils ont bar­ré le drume !

Oui, je vois. On se plimbe un peu ?

Fran­che­ment j’hésite; ça risque d’enquider chez Car­re­four, et alors mes coumpărătours…

Ok, allez, vas-y. Je vais aus­si prendre le barcase.

Ah oui ? Mais tu ne vas pas avec la machine ?

Je pour­rais, mais c’est plus court comme ça, sur­tout main­te­nant qu’ils ont mis tous ces stops.

Aha. Bien. Alors je t’embrasse.

Moi aus­si. Et puis… ben, qu’est-ce que je peut te dire ? Baftă. Tu dois t’infiger.

Oui… Je sais. Mer­ci. Tchô.

Tchô. On se parle.

Mais oui. Tchô.

Tchô.

(Quelques ins­tants plus tard)

Ecoute !

Quoi !

Vous n’avez pas oublié les skis chez nous, au bétch ?

Oulà !

Mais oui.

Psss… Ouais… Ceux qu’on a rame­nés avec le microbuse !…

Qui ça ?!

Enfin…  ils étaient éga­rés dans la cale, et la com­pa­gnie les a rame­nés direc­te­ment chez vous, tu te souviens ?

Ah, mais oui… Bien, vous venez donc les prendre.

Ok, mer­ci. Mais t’oublies pas d’enlever la drou­jbe; tu te sou­viens, la fois passée…

?!

Quoi ? Est-ce que je ne l’ai pas ramas­sé au point de faillir me roupre les ligaments?

Ha-ha, ok. Pe cuvînt. Tchô. Vas-y.

Tchô, et merci.

[7 jouen 2014]

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